En 2019 les médias, aussi bien spécialisés que généralistes, avaient largement relayé la décision de l’Office des marques de l’Union Européenne (EUIPO) annulant la célèbre marque BIG MAC de la société McDonald’s pour non-usage.
Cette décision avait fait grand bruit car il était impensable qu’une marque aussi célèbre se voit annulée, alors que chacun sait que le hamburger BIG MAC est un incontournable de la chaîne de Fast Food américaine.
Que les amateurs de sandwichs se rassurent, le 14 décembre 2022 la Chambre de Recours de l’EUIPO a renversé la décision de 2019.
Un peu de de contexte…
Cette affaire qualifiée de « David contre Goliath, version fast-food[1] » oppose le géant McDonald’s à la petite chaîne de restauration rapide Supermac fondée en 1978 et comptant une centaine d’établissements en Irlande et en Irlande du Nord. En 2014, cette dernière souhaite s’étendre à l’étranger et dépose une demande de marque SUPERMAC en Union Européenne. McDonald’s s’empresse alors de former opposition contre ce dépôt. L’attaque étant la meilleure défense, la société irlandaise introduit en 2017 une action en annulation de la marque BIG MAC pour défaut d’exploitation sérieuse.
Pertes et fracas…
Dans la plupart des pays, pour être valable une marque enregistrée doit être effectivement exploitée en lien avec les produits et services qu’elle désigne. En Union Européenne, cette obligation d’usage pèse sur les titulaires de marques enregistrées depuis plus de cinq années. Ce qui était le cas de la marque BIG MAC contestée.
La société McDonald’s pour se défendre devait donc produire des preuves d’usage de sa marque permettant d’établir le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage.
Or les éléments transmis par la société McDonald’s ont été jugés insuffisants. En effet le dossier était constitué de :
- La page Wikipédia concernant le hamburger BIG MAC ;
- Plusieurs affidavits signés par des représentants du groupe McDonalds ;
- Brochures et affiches publicitaires ;
- Plusieurs impressions d’écran du site internet de la société.
L’EUIPO a indiqué que ces éléments n’étaient pas recevables car la plupart émanent de la défenderesse et manquent d’indépendance (les affidavits, les brochures et extraits de site) ou de fiabilité (les pages Wikipédia modifiables par l’ensemble de utilisateurs). Par ailleurs, les extraits de sites internet n’étaient pas accompagnés d’éléments liés au trafic et aucune donnée chiffrée indépendante relative aux ventes n’apparaissait.
L’Office en conclu que les seuls éléments transmis ne permettent pas d’établir un usage sérieux de la marque BIG MAC en Union Européenne et prononce ainsi sa nullité.
Le come-Back du Big Mac…
Sans surprise la société McDonald’s n’a pas attendu pour former un recours contre la décision de la division d’annulation de l’EUIPO. Ayant retenu la leçon, la défenderesse dépose un mémoire accompagné de plusieurs centaines de pages de documents (articles de presse, sondages, audits…) visant à établir l’exploitation de la marque BIG MAC en Union Européenne.
Bien que la société SUPERMAC conteste l’admissibilité des ces éléments nouveaux présentés au stade de l’appel, l’Office les accepte en précisant que « ces éléments de preuve supplémentaires ne font que compléter et développer les preuves présentées dans le cadre de la procédure devant la division d'annulation et concernent directement l'usage de la marque contestée ». Ces documents étant pertinents pour l’issue de l’affaire, ils doivent être étudiés et pris en compte.
Nous notons à cette occasion que certaines preuves écartées par la division d’annulation trouvent finalement grâce aux yeux de la chambre des recours. Tel est le cas de l’article Wikipédia et des Affidavits qui retrouvent une certaine force probante puisqu’ils confirment et corroborent les informations contenues dans les autres sources.
La marque BIG MAC est finalement validée pour les produits et services suivants :
- Classe 29 - Aliments préparés à partir de produits à base de viande et de volaille, sandwichs à la viande, sandwichs au poulet ;
- Classe 30 - Sandwichs comestibles, sandwichs à la viande, sandwichs au poulet ;
- Classe 42 - Services rendus ou associés à l'exploitation de restaurants et d'autres établissements ou installations engagés dans la fourniture d'aliments et de boissons préparés pour la consommation et pour les services au volant ; préparation de plats à emporter.
Et vous, avez-vous des preuves d’usage valables ?
En pratique, cette affaire rappelle l’importance d’être en mesure d’établir l’exploitation effective de sa marque. Les points importants à retenir sont les suivants :
- Ce n’est pas parce qu’une marque est connue que le dossier de preuve d’usage peut être allégé. Les examinateurs ne peuvent déterminer l’usage réel d’une marque que sur la base des éléments que vous leur fournissez. Il convient donc de déposer un dossier étayé.
- Les preuves émanant directement du déposant ont une force probante moindre. Il est préférable de pouvoir les associer à des documents provenant de sources externes (sondages, articles de presse).
- Pour ce faire, constituez-vous un recueil de preuves d’usage de vos marques afin d’être en mesure de pouvoir les fournir dès qu’un tiers en fait la demande.
Nous sommes à votre disposition pour vous assister dans la constitution de ce dossier et pour toute question relative à l’exploitation de vos marques.
Alors, contactez - nous !
Marie Breuil